L’entretien des monuments historiques apparaît véritablement comme une préoccupation vers la fin du XVIIIe siècle, dans les écrits de certains lettrés et les discours de représentants du peuple. L’émergence de cette conscience patrimoniale conduit à l’élaboration de différentes doctrines en matière de préservation de l’architecture monumentale dans le courant du XIXe siècle, doctrines à l’origine de chartes internationales adoptées le siècle suivant. Les principes et recommandations qu’elles contiennent dans le domaine de la conservation-restauration sous-tendent les entreprises de rénovation mises en œuvre pour préserver le patrimoine architectural ainsi que l’illustre, à titre d’exemple, le projet de restauration de l’hôtel particulier lyonnais de Lacroix-Laval.
Les polémiques qui émaillent l’actualité et le débat public depuis près de deux ans autour de la reconstruction de la cathédrale Notre-Dame de Paris ont mis en lumière les débats qui existent quant à la façon dont se conçoit la conservation-restauration des monuments historiques. Alors que la conservation renvoie aux différents types d’interventions nécessaires pour assurer « la survie » d’une œuvre (opérations visant notamment à protéger, à contrer les processus d’altération, à consolider etc.), la restauration correspond à l’action tendant à donner en quelque sorte une nouvelle vie à cette œuvre, à la mettre en valeur en lui restituant sa lisibilité, son unité, sa valeur esthétique[1]. Intimement liés, les deux termes sont souvent accolés. La conservation-restauration appliquée au domaine du patrimoine architectural consiste ainsi en travaux devant permettre la préservation du bâti en question, et son rétablissement dans un état mettant en évidence ses qualités esthétiques et sa valeur historique. Cette préoccupation, qui naît à la fin du XVIIIe siècle, se traduit au siècle suivant par l’élaboration de théories de la conservation et de la restauration des monuments anciens. Les principes alors dégagés sont pour certains repris au XXe siècle dans des chartes internationales venant encadrer l’action en la matière à travers des recommandations qui, dans plusieurs pays comme en France, gouvernent les projets de conservation-restauration des monuments historiques. La restauration en cours de l’hôtel particulier lyonnais de Lacroix-Laval permet d’apprécier de façon concrète la teneur de ces chartes, héritières d’une riche pensée de la préservation et de la valorisation du patrimoine architectural.
L’élaboration progressive de théories de la conservation-restauration
La notion de conservation architecturale trouve son origine dans le souci, au cours de la période révolutionnaire, de protéger des édifices considérés comme appartenant à notre patrimoine, édifices qui, pour certains, ne font alors pas l’objet d’entretien voire, sont dégradés sciemment, ce que dénoncent de grandes figures politiques et intellectuelles de la fin du XVIIIe et du début du XIXe siècle, parmi lesquels l’abbé Grégoire ou encore Victor Hugo. L’intervention de l’État en la matière se traduit notamment par la création en 1830, à l’initiative du ministre de l’Intérieur François Guizot[2], du poste d’Inspecteur général des monuments historiques, confié à Ludovic Viet puis, en 1834, à Prosper Mérimée[3]. C’est dans ce contexte qu’est dressée, en 1840, une liste des monuments à protéger en tant qu’ils sont jugés relever du patrimoine architectural et qu’ils doivent par conséquent, estime-t-on, être transmis aux futures générations. Parallèlement et en lien avec cette action étatique, le XIXe siècle voit se développer plusieurs théories de la conservation et de la restauration architecturale. Une confrontation célèbre oppose deux figures du monde de l’art de cette époque sur cette question, l’architecte français Eugène Viollet-le-Duc (1814-1879) et le critique d’art anglais John Ruskin (1819-1900)[4]. Pour Viollet-le-Duc, restaurer un monument revient à reconstituer son style architectural originel, ce qui autorise certaines libertés au restaurateur, en droit de réparer, de reconstruire des parties du monument disparues au fil du temps, d’embellir (y compris en laissant parler son imagination, à condition que l’ornement relève du style architectural en question), et même de supprimer les éléments ajoutés à d’autres époques, dès lors que ces ajouts ne relèvent pas du style initial de l’édifice. Il s’agit en somme, dans cette optique, de chercher à restituer une unité stylistique au monument en procédant notamment par analogie avec les édifices similaires, Viollet-le-Duc estimant que « restaurer un bâtiment n’est pas le préserver, le repeindre, le réparer ou le reconstruire, c’est le replacer dans un état complet qui a pu ne jamais exister ».[5] À cette théorie de la restauration stylistique, à travers laquelle il faut lire, par exemple, les travaux controversés de l’architecte sur la cathédrale Notre-Dame de Paris[6], s’oppose celle de son contemporain John Ruskin, pour qui l’entreprise de restauration revient à détruire le monument[7], dénaturé par des ajouts inauthentiques. Ainsi, restauration serait falsification. Il convient donc, dans cet ordre d’idées, de chercher à conserver le monument en l’état et ce, même s’il se présente sous la forme de ruines, ou plutôt, faudrait-il dire, surtout s’il se présente sous la forme de ruines. En effet, pour Ruskin, c’est à l’état de ruine que se déploient la beauté et la puissance évocatrice du monument historique dans toute leur splendeur. Il se rattache en cela à un courant romantique magnifiant les ruines pour ce qu’elles disent du passé à travers un visuel pittoresque incitant à la méditation, un visuel à l’origine d’un imaginaire historique mélancolique, dont les peintures, romans et autres poèmes de l’époque se font l’écho[8].
Outre la restauration stylistique de Viollet-le-Duc et la conservation romantique de Ruskin, d’autres théories de la conservation-restauration du patrimoine architectural sont élaborées vers la fin du XIXe siècle en Italie, autour de deux importantes figures du monde de l’architecture[9]. Luca Beltrami (1854-1933) est en faveur d’une « restauration historique », en ce sens que le restaurateur doit, en amont de son intervention sur le monument, effectuer un minutieux travail de recherche s’appuyant sur le recours aux archives, visant à établir rigoureusement la réalité architecturale originelle de la construction, ses actes de restauration devant être fidèles à cette réalité telle qu’attestée par les sources à sa disposition. Une conception se démarquant de celles décrites précédemment en ce que, contrairement à la position des tenants de la conservation romantique, il importe là de restaurer le monument plutôt que de le conserver à l’état de ruines et que, à la différence de ce que prévoit la restauration stylistique, le restaurateur n’est pas autorisé à intervenir en laissant libre cours à son imagination en se contentant de chercher à restituer le style architectural initial de l’édifice. La conception de Camillo Boito (1836-1914) enfin apparaît en quelque sorte comme une synthèse de ces différentes théories de la conservation-restauration. Soucieux de préserver l’authenticité des monuments historiques, Boito pose comme principe que la consolidation doit primer sur la restauration[10]. Les adjonctions sont possibles si indispensables mais il importe, d’une part, que ces dernières reposent sur des données fiables[11] et d’autre part, que ces ajouts se distinguent aisément des parties anciennes de l’édifice, de façon à ne pas fausser l’appréciation que l’on a de la valeur historique de ses différentes composantes[12]. Il convient donc qu’il n’y ait pas de confusion possible entre le bâti originel et les ajouts contemporains réalisés dans le cadre de la restauration[13]. Dans la vision de cet architecte enfin, les ajouts d’autres époques à l’édifice n’ont pas à être supprimés mais au contraire préservés au même titre que le reste du monument[14], et ce peu importe que l’harmonie stylistique initiale de la construction ait été ou non remise en cause. En effet, les différentes époques sont ici vues comme des strates ayant, pour ainsi dire, « apporté leur pierre à l’édifice », en enrichissant le monument d’éléments contribuant in fine à lui donner une unité, par-delà la diversité inhérente à l’ensemble composite issu de ces adjonctions successives. Cette façon de concevoir la conservation-restauration aura une longue postérité, inspirant dans une large mesure le contenu des chartes internationales du XXe siècle qui régissent la matière.
L’adoption de chartes internationales en matière de conservation-restauration
Le premier de ces textes, adopté à Athènes en 1931 dans le cadre du premier Congrès international des architectes et des techniciens des monuments historiques (21-30 octobre 1931), est la charte pour la restauration des Monuments Historiques, qui met en avant la nécessité d’entretenir les monuments de façon régulière et permanente afin d’en assurer la conservation. Cette charte, qui souligne l’importance de « respecter l’œuvre historique et artistique du passé, sans proscrire le style d’aucune époque »[15], invite les archéologues et les architectes à collaborer étroitement et permet, pour la consolidation des édifices anciens, « l’emploi judicieux de toutes les ressources de la technique moderne et plus spécialement du ciment armé »[16], précisant que « ces moyens confortatifs doivent être dissimulés sauf impossibilité, afin de ne pas altérer l’aspect et le caractère de l’édifice à restaurer »[17]. L’occupation des monuments est recommandée, « en les consacrant toutefois à des affectations qui respectent leur caractère historique ou artistique »[18]. La mise en valeur des monuments implique par ailleurs le respect de leurs alentours, qui doivent aussi, aux termes de la charte, « être l’objet de soins particuliers »[19].
Le deuxième Congrès international des architectes et des techniciens des monuments historiques, qui se tient du 25 au 31 mai 1964 dans le but de « réexaminer les principes de la Charte [d’Athènes de 1931] afin de les approfondir et d’en élargir la portée dans un nouveau document »[20], donne lieu une nouvelle fois à l’adoption d’un texte majeur en matière de restauration en la charte de Venise. Celle-ci prévoit, en son article 1er, que « la notion de monument historique […] s’étend non seulement aux grandes créations mais aussi aux œuvres modestes qui ont acquis avec le temps une signification culturelle ». Cette charte rappelle, en opposition avec la conception d’Eugène Viollet-le-Duc, que « les apports valables de toutes les époques à l’édification d’un monument doivent être respectés, l’unité de style n’étant pas un but à atteindre au cours d’une restauration » (article 11). L’accent est mis sur le fait que les travaux de restauration doivent garder un caractère exceptionnel et s’appuyer sur des recherches archéologiques et historiques, la conservation-restauration ayant « pour but de conserver et de révéler les valeurs esthétiques et historiques du monument » et se fondant « sur le respect de la substance ancienne et de documents authentiques » (article 9). Dès lors que les travaux de conservation-restauration consistent en « reconstitutions conjecturales », la charte précise au même article que « tout travail de complément reconnu indispensable pour raisons esthétiques ou techniques […] portera la marque de notre temps », étant entendu qu’en tout état de cause, « les éléments destinés à remplacer les parties manquantes doivent s’intégrer harmonieusement à l’ensemble, tout en se distinguant des parties originales, afin que la restauration ne falsifie pas le document d’art et d’histoire » (article 11). S’agissant de l’emploi des matériaux modernes pour la consolidation des constructions anciennes, autorisé par la charte d’Athènes, la charte de Venise encadre cet emploi, précisant que « lorsque les techniques traditionnelles se révèlent inadéquates, la consolidation d’un monument peut être assurée en faisant appel à toutes les techniques modernes de conservation et de construction dont l’efficacité aura été démontrée par des données scientifiques et garantie par l’expérience ».
La charte de Cracovie de l’an 2000 confirme les principes de restauration énoncés dans les deux chartes antérieures (intervention minimum, authenticité, intégrité et identité) et vient à nouveau nuancer la question du recours aux matériaux et techniques modernes utilisés pour la conservation-restauration, spécifiant que « tout nouveau matériau, toute nouvelle technologie doivent être rigoureusement testés, comparés et maîtrisés avant application », un suivi permanent devant ensuite être mis en place[21]. Par ailleurs, cette troisième charte rend compte de ce que la préservation du patrimoine bâti passe aussi par des interventions visant, tout en se montrant respectueux de l’identité et de l’authenticité du monument, à assurer une adaptation de ce dernier à son affectation contemporaine, considérant l’œuvre de restauration comme « une intervention dirigée sur un bien patrimonial, dont l’objectif est la conservation de l’authenticité et son appropriation par la communauté ». Dans cette optique, conserver ne revient pas nécessairement à restaurer à l’identique de l’architecture originelle, mais dans certains cas à chercher dans quelle mesure le monument peut faire l’objet de travaux tendant à remodeler certains de ses éléments pour le mettre en conformité avec sa destination, sans remettre en cause son intégrité et son identité.
La France ayant ratifié ces trois chartes, c’est sous leur empire que sont menées les entreprises de conservation-restauration du patrimoine architectural français. L’étude de la restauration de l’hôtel particulier de Lacroix-Laval à Lyon fournit un exemple concret en la matière.
La rénovation de l’hôtel particulier de Lacroix-Laval : les principes des chartes internationales en filigrane
Le jeudi 2 mars 2017, la Ministre de la Culture et de la Communication Audrey Azoulay, se voyait remettre, au musée des Beaux-Arts de Lyon, le rapport de la mission “Musées du XXIe siècle”, comportant des pistes pour un renouveau des musées pour les décennies à venir. Parmi les axes directeurs retenus dans ce rapport, figure l’idée d’un « musée protéiforme », devant notamment apparaître comme un « musée vivant » et contemporain. C’est dans ce cadre que la région Auvergne-Rhône-Alpes, propriétaire du musée des Tissus et des Arts décoratifs depuis 2018, a initié un projet de transformation de ce lieu culturel avec pour objectif d’ « offrir au public une expérience de visite inoubliable en plein cœur de la capitale de la soie[22] ». Situé dans le 2e arrondissement de Lyon, ce musée, dont les collections textiles font partie des plus importantes au monde, se compose de deux hôtels particuliers du XVIIIe siècle, l’hôtel de Lacroix-Laval et l’hôtel de Villeroy. Ces deux édifices, qui abritent respectivement le musée des Arts décoratifs de la ville de Lyon depuis 1925 et le musée des Tissus depuis 1946, doivent ainsi, à l’issue de travaux conduits par l’architecte Rudy Ricciotti, être reliés et assortis de constructions contemporaines, l’ensemble, achevé à l’horizon 2026, formant en définitive un seul et même musée dédié aux arts décoratifs et aux tissus. La rénovation de l’hôtel de Lacroix-Laval, dont l’architecte serait le concepteur du Panthéon de Paris, Jacques-Germain Soufflot (1713-1780), est la première étape du projet de métamorphose du musée des Tissus et des Arts décoratifs.
Le respect de l’identité et de l’authenticité du monument
Qualifié de « joyau lyonnais »[23], ou encore de « perle architecturale »[24], l’hôtel de Lacroix-Laval, construit entre 1739 et 1754[25], est l’un des derniers exemples d’hôtels particuliers du XVIIIe siècle présents dans la ville de Lyon. À l’origine demeure aristocratique appartenant à la famille de Lacroix-Laval, cet édifice devenu musée voit en 1957 son statut revalorisé par son inscription au titre des Monuments historiques. Une reconnaissance de l’intérêt patrimonial de cet hôtel particulier génératrice d’importantes conséquences sur le plan juridique, ce monument, désormais protégé, devant faire l’objet d’un entretien régulier et permanent, et donc de travaux de restauration visant sa conservation et sa mise en valeur. C’est dans cet esprit que des travaux ont été initiés en janvier 2021 à l’instigation de la région Auvergne-Rhône-Alpes, dans le but affiché de « permettre une restauration du bâtiment dans l’esprit XVIIIe et le restituer au plus près de son état d’origine »[26]. La restauration de cet hôtel particulier a été précédée d’une étude historique et architecturale poussée du site à travers la réalisation de diagnostics, ce qui s’est traduit notamment par l’exploitation d’archives et le recours à l’archéologie, de façon à ce que les travaux soient le plus respectueux possible de l’authenticité du monument[27]. Une nécessité allant de pair avec le souci d’adaptation de l’édifice à sa destination contemporaine. En effet, la « continuité de la vie » de ce monument, pour reprendre les termes employés dans la charte d’Athènes[28], a été assurée en 1925 lorsque cette construction a été choisie pour abriter le musée des Arts décoratifs de la ville de Lyon, affectation somme toute classique pour un hôtel particulier[29] et en tout état de cause, de nature à respecter son caractère historique et artistique. Dès lors, la rénovation de ce bâtiment est aussi pensée en tenant compte du fait que ce dernier se conçoit comme un lieu emblématique de Lyon devant faire, par ses fonctions muséales et sa mise en valeur, l’objet d’une réappropriation par les habitants, ce qui suppose nécessairement de l’adapter à l’accueil du public. Conformément aux recommandations des chartes internationales susmentionnées, la conservation-restauration de cet édifice consiste donc in fine en un équilibre entre, d’une part, la nécessité de demeurer fidèle à son caractère historique et artistique, et d’autre part, le souci de maintenir une occupation de ce monument, visant à permettre la continuité de « sa vie » et son appropriation par la communauté. Ce qui explique que, si le respect de l’esprit du XVIIIe siècle et de l’authenticité architecturale de l’hôtel particulier de Lacroix-Laval est de la plus haute importance dans ce projet de rénovation et que le maximum soit fait par conséquent pour qu’à l’issue des travaux cet édifice ressemble à ce qu’il était à l’origine, il ne s’agit pas pour autant de chercher à retrouver exactement l’état primitif du monument[30].
Des matériaux et interventions de nature à préserver l’intégrité du monument
Les matériaux utilisés pour cette restauration ont été sélectionnés pour leur adéquation avec les caractéristiques architecturales du bâtiment mais aussi pour leur dimension écologique, en sachant que comme le prévoit la charte de Venise, les techniques et matériaux traditionnels ont été privilégiés. La toiture a été refaite avec des tuiles canal[31], utilisées traditionnellement à Lyon et éclaircies pour être en accord avec le bâti alentour[32]. La rénovation de la façade a été réalisée à l’aide d’un mortier composé de sable de la Saône et de chaux naturelle[33], soit le type d’enduit utilisé à l’époque de la construction du bâtiment. Quelque 200 fenêtres ont été remplacées, leur conception respectant là encore les caractéristiques du bâti originel, sur le plan de l’esthétique et du type de matériau utilisé (chêne français)[34]. Les parties composées de pierres de taille ont fait l’objet d’un rejointoiement et celles en mauvais état ont été remplacées[35]. La restauration concerne par ailleurs un certain nombre d’éléments qui ne faisaient pas partie de l’hôtel initialement. En effet, l’hôtel de Lacroix-Laval a été considérablement remanié dans son architecture et son ornementation depuis sa construction, si bien qu’il est aujourd’hui difficile de savoir avec précision quel était son aspect intérieur à l’origine[36]. Conformément à la vision de la charte d’Athènes et de la charte de Venise, ces ajouts, effectués pour certains au cours du XIXe ou du XXe siècle, sont vus comme participant de la valeur historique et artistique du monument et sont à ce titre traités avec le même soin que le reste de la construction[37]. Cette dernière compte à cet égard un grand nombre d’éléments issus d’autres hôtels particuliers et incorporés plus ou moins tardivement au bâti de Lacroix-Laval, comme des lambris et autres boiseries appartenant initialement à d’autres édifices de Lyon et de Paris[38] ou encore des garde-corps provenant d’un ancien hôtel particulier parisien. Installés dans le courant du XXe siècle, ces derniers ont été, dans le cadre de la restauration en cours, décorés à la feuille d’or[39]. Parmi les éléments intégrés au bâtiment lors des travaux, certains faisaient probablement à l’origine déjà partie de l’hôtel avant d’en être retirés au cours de son histoire, sans que l’on en ait de certitudes, à l’instar de ces cheminées conservées dans les caves de l’hôtel qui, après restauration, ont trouvé (ou peut-être retrouvé) place sur le toit de l’édifice, permettant, au-delà de leur valeur architecturale, de dissimuler les systèmes d’évacuation d’air[40] dont doit nécessairement être doté un lieu recevant du public, étant entendu que, si les techniques modernes sont admises en matière de restauration, les chartes mettent l’accent sur la nécessité de préserver l’esthétique du monument et « de ne pas altérer l’aspect et le caractère de l’édifice à restaurer »[41], selon les termes de la charte d’Athènes.
Cet exemple lyonnais de conservation-restauration peut ainsi se lire à l’aune des principes des chartes internationales adoptées en matière de préservation du patrimoine architectural, principes apparaissant comme l’aboutissement d’une pensée de la restauration trouvant son origine dans un XIXe siècle soucieux de préserver les constructions monumentales que les différentes époques nous ont léguées, pour leur valeur historique et artistique, et les univers passés que leur vue donne à appréhender.
[1]DI MATTEO Colette , GAZZOLA Piero, « RESTAURATION (architecture) », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 11 janvier 2022. URL : http://www.universalis-edu.com.faraway.parisnanterre.fr/encyclopedie/restauration-architecture/ ; SALLAVUARD Guy, 2021. « Les 100 mots du patrimoine », Guy Sallavuard éd., Les 100 mots du patrimoine. Presses Universitaires de France, p. 110 ; « Restauration » [En ligne] https://www.larousse.fr/encyclopedie/peinture/restauration/154081 (consulté le 31 janvier 2022) ;
[2] « Au service d’une politique nationale du patrimoine : le rôle incontournable du Centre des monuments nationaux » [En ligne], https://www.senat.fr/rap/r09-599/r09-59933.html (consulté le 30 janvier 2022).
[3] COMPAIN-GAJAC, Catherine. De la notion de conservation-restauration : Rapportée à l’architecture du Mouvement Moderne In : Conservation-restauration de l’architecture du mouvement moderne [en ligne]. Perpignan : Presses universitaires de Perpignan, 2012 (généré le 11 janvier 2022). Disponible sur Internet : <http://books.openedition.org/pupvd/6897>. ISBN : 9782354124205. DOI : https://doi.org/10.4000/books.pupvd.6897.
[4] SALLAVUARD Guy, 2021. Op. cit.
[5] VIOLLET-LE-DUC Eugène, 1854. Dictionnaire raisonné de l’architecture du xie au xvie siècle, Paris, Éditions B. Bance, p. 81.
[6] DI MATTEO Colette , GAZZOLA Piero. Op. cit.
[7] RUSKIN John, 1879. Les Sept Lampes de l’architecture.
[8] LYON-CAEN Judith, 2018. « Voir le passé dans les ruines romantiques : une histoire politique et littéraire », Sociétés & Représentations, vol. 45, no. 1, pp. 233-260.
[9] DI MATTEO Colette, GAZZOLA Piero. Op. cit.
[10] CARRIVE Mathilde, 2006. « La restauration architecturale » [En ligne] http://www.archeologiesenchantier.ens.fr/spip.php?article20
[11] DI MATTEO Colette, GAZZOLA Piero. Op. cit.
[12] BOITO Camillo, 2000. Conserver ou restaurer, les dilemmes du patrimoine, Besançon, Éd. de l’Imprimeur, p. 24.
[13]POIRIER Morgane, 2014. « La notion de réversibilité en conservation-restauration » [En ligne] https://tablesdetravail.hypotheses.org/721
[14] DI MATTEO Colette, GAZZOLA Piero. Op. cit.
[15] Partie I des conclusions générales de la Conférence d’Athènes de 1931 (« Doctrines. Principes généraux »).
[16] Partie IV des conclusions générales de la Conférence d’Athènes de 1931 (« Les matériaux de restauration»).
[17] Ibid.
[18] Partie I des conclusions générales de la Conférence d’Athènes de 1931 (« Doctrines. Principes généraux »).
[19] Partie III des conclusions générales de la Conférence d’Athènes de 1931 (« La mise en valeur des monuments »).
[20] Charte de Venise, téléchargeable en ligne : https://www.culture.gouv.fr/Thematiques/Conservation-restauration/La-conservation-restauration-en-France/Principes-et-methodes-de-la-conservation-restauration/Organismes-chartes-et-recommandations-internationales
[21] DE LAGARDE Olivier, DE LAGARDE Pierre, 2019. Dictionnaire amoureux du patrimoine, Plon, Paris, 800 p.
[22] « Le musée en travaux ». Site internet du musée des Tissus et des Arts décoratifs, https://www.museedestissus.fr/page/12:renouveau-du-musee (consulté le 30 janvier 2022)
[23] Lyon Entreprises. « Musée des tissus : en chantier, l’hôtel de Lacroix-Laval se dévoile » [En ligne] Publié le 22 octobre 2021 – Mis à jour le 26 octobre 2021, https://www.lyon-entreprises.com/actualites/article/musee-tissus-lacroix-laval
[24] Région Auvergne-Rhône-Alpes, 2021. « Renaissance du musée des tissus. Etape 1 Restauration de l’hôtel de Lacroix-Laval : un chantier exemplaire », dossier de presse téléchargeable en ligne : https://www.auvergnerhonealpes.fr/290-communiques-et-dossiers-de-presse.htm?thematique=THEMA_CLT#outerFiltre
[25] « L’hôtel de Lacroix-Laval », https://www.lyonhistorique.fr/hotel-de-lacroix-laval/ (consulté le 30 janvier 2022)
[26] Région Auvergne-Rhône-Alpes, 2021. « Renaissance du musée des tissus. Etape 1 Restauration de l’hôtel de Lacroix-Laval : un chantier exemplaire », dossier de presse téléchargeable en ligne : https://www.auvergnerhonealpes.fr/290-communiques-et-dossiers-de-presse.htm?thematique=THEMA_CLT#outerFiltre
[27] Région Auvergne-Rhône-Alpes, 2021. Ibid. ; Rédaction du journal Tribune de Lyon. « Lyon. Le chantier du futur Musée des tissus tombe bientôt le voile », [En ligne] Publié le 22 octobre 2021, https://tribunedelyon.fr/2021/10/22/lyon-le-chantier-du-futur-musee-des-tissus-tombe-bientot-le-voile/ ; JAME Hadrien, « Lyon : le musée des Tissus a entamé sa mue, l’avancée des travaux en photos » [En ligne], Publié le 21 octobre 2021, https://www.lyoncapitale.fr/actualite/lyon-le-musee-des-tissus-a-entame-sa-mue-lavancee-des-travaux-en-photos
[28] Partie I des conclusions générales de la Conférence d’Athènes de 1931 (« Doctrines. Principes généraux »).
[29] Elane RIBEIRO PEIXOTO, 2002. « Autour des reconversions architecturales et des monuments historiques », L’Homme & la Société, vol. 145, no. 3, pp. 51-65.
[30] Lyon Entreprises. Op. cit. ; JAME Hadrien. Op. cit.
[31] Rédaction du journal Tribune de Lyon. Op. cit.
[32] « Musée des Tissus : la restauration de l’hôtel Lacroix-Laval » [En ligne], Publié le 22/10/2021, https://nouveaulyon.fr/2021/10/22/musee-des-tissus-la-restauration-de-lhotel-lacroix-laval/
[33] Rédaction du journal Tribune de Lyon. Op. cit.
[34] SEVEYRAT Eric. « Musée des Tissus : tout premier point d’étape du chantier » [En ligne] Publié le 22 octobre 2021, https://www.journal-du-btp.com/territoires-rhone-port-folio-musee-des-tissus-tout-premier-point-d-etape-du-chantier-2714.html
[35] Région Auvergne-Rhône-Alpes, 2021. Op. cit.
[36] Rédaction du journal Tribune de Lyon. Op. cit. ; « Musée des Tissus : la restauration de l’hôtel Lacroix-Laval » [En ligne]. Op. cit.
[37] Lyon Entreprises. Op. cit.
[38] « Musée des Tissus : la restauration de l’hôtel Lacroix-Laval » [En ligne]. Op. cit. ; SEVEYRAT Eric. Op. cit.
[39] JAME Hadrien. Op. cit.
[40] SEVEYRAT Eric. Op. cit. ; « Musée des Tissus : la restauration de l’hôtel Lacroix-Laval » [En ligne], op. cit. ; Région Auvergne-Rhône-Alpes, 2021. Op. cit.
[41] Partie IV des conclusions générales de la Conférence d’Athènes de 1931 (« Les matériaux de restauration »).
Légende de l’image : Ruines du château de Bressieux (Isère), lithographie de victor CASSIEN (1808-1893) dans CASSIEN Victor, DEBELLE Alexandre (1839), Album du Dauphiné, Tome IV, Prudhomme, Grenoble, 1839.
OpenEdition vous propose de citer ce billet de la manière suivante :
chloeleribaut (26 février 2022). Insam Youssef. La conservation-restauration architecturale : de la doctrine à la mise en œuvre contemporaine. Master Histoire de Nanterre. Consulté le 10 décembre 2024 à l’adresse https://doi.org/10.58079/mzfa