Le Musée Carnavalet – Histoire de Paris propose jusqu’au 10 avril l’exposition Marcel Proust, un roman parisien. Au travers de liens étroits tissés entre la vie intime, mondaine, artistique et culturelle de l’écrivain, ses œuvres majeures – dont bien évidemment A La Recherche du temps perdu – et le Paris de la Belle Epoque jusqu’à l’après-guerre, cette exposition richement illustrée de tableaux, photographies, plans, maquettes, manuscrits ou encore objets personnels de Marcel Proust, nous plonge au cœur de la vie quotidienne parisienne au tournant des XIXe et XXe siècles. 

Depuis le 16 décembre dernier et jusqu’au 10 avril prochain, le musée Carnavalet – Histoire de Paris (23, rue Sévigné à Paris, 3ème) propose l’exposition Marcel Proust, Un Roman Parisien. À l’occasion des 150 ans de la naissance de l’auteur d’A La Recherche du Temps perdu (10 juillet 1871-18 novembre 1922), cette exposition nous offre l’opportunité de retracer son parcours dans différents lieux parisiens tout au long de son existence. Ainsi, sa vie privée, la société mondaine dans laquelle il évolue, ses nombreuses relations artistiques, jusqu’aux commerces avec ses fournisseurs ou même les plus obscurs lieux interlopes qu’il a pu fréquenter, les différentes salles de l’exposition ne laissent de côté aucun des aspects de la vie quotidienne d’une époque, au tournant des XIXe et XXe siècles.. 

Entre Histoire et histoire, ou quand la confrontation du réel et de la fiction nous plonge au cœur de l’acte intime de création 

Au travers d’un parallèle subtil et constant, tel un fil rouge entre le réel de l’époque et la fiction romanesque, une sélection d’extraits majeurs de son œuvre entre en résonnance naturelle avec les différentes thématiques des salles. C’est là un moyen particulièrement habile et d’une efficacité redoutable pour mettre en perspective les indiscutables liens de ce roman à clés avec la destinée de son auteur et, plus globalement, avec la vie mondaine, artistique, politique et culturelle de l’époque. C’est aussi l’occasion de « toucher du doigt » la genèse d’une œuvre qui semble en perpétuelle construction avec notamment la présentation de manuscrits et de leurs fameuses paperolles, ces étroites bandes de texte qui habillent les pages rédigées afin de préciser, corriger, amender, remplacer ou simplement compléter le premier jet de l’écrivain.  

Cette exposition nous offre également une rencontre inédite avec le vécu le plus privé de Marcel Proust lors de la découverte, au détour d’une salle à la muséographie d’une force particulièrement intimiste, de son lit aux simples barreaux de cuivre et quelques-uns de ses effets personnels. De nombreuses photos de l’intérieur de ses différents appartements, et notamment du 44 rue Hamelin où il a rédigé la majorité de son œuvre, complètent avantageusement cette entrée de plain-pied dans l’univers du romancier. 

 

Une plongée au cœur de son œuvre 

En renforçant la dimension quasi immersive dans cette œuvre multiforme, les nombreuses salles, déjà fort bien dotées en objets et informations pour qui est un inconditionnel de La Recherche, font également la part belle à l’une des thématiques essentielles de ce roman d’initiation à l’art sous toutes ses formes. En effet, la large palette des couleurs artistiques dont il est question dans le roman émaille un parcours muséal abondamment illustré :  tableaux de peintres de l’époque (Camille Pissaro, Edouard Monet, Gustave Caillebotte, Jacques-Emile Blanche, et d’autres moins célèbres mais aux toiles tout aussi splendides), des photographies (qui permettent au passage de découvrir Marcel enfant, adolescent, jeune homme, animal mondain, jusque sur son lit de mort), des œuvres musicales (dont les quatuors de Beethoven en fond musical dans une des salles, ainsi que dans la vidéo jointe à ce billet) qui nous plongent dans l’ambiance du salon de Madame Verdurin, des plans, maquettes ou documents architecturaux (on découvre au passage l’ensemble des plans des appartements successifs occupés par Marcel Proust à Paris) ainsi que des mobiliers d’exception ou des vêtements à la mode au tournant du siècle. Sans oublier, au détour d’une salle, forme d’art populaire s’il en est, une intéressante liste des cris des marchands ambulants du Paris de l’époque ! 

Une histoire parisienne au tournant du siècle 

En conclusion, nous pouvons dire que cette exposition se situe à la croisée de la vie intime d’un auteur majeur de la littérature française, d’une œuvre fondatrice du roman français du XXe siècle, d’une période historique contrastée entre Belle Epoque et Première Guerre Mondiale et, enfin, d’une capitale à l’apogée de sa vie culturelle et mondaine au tournant des deux siècles. Le seul petit bémol que nous pourrions trouver à cette passionnante exposition concerne l’exigüité de la majorité des salles, ne permettant pas toujours de prendre le recul nécessaire pour admirer pleinement les œuvres présentées, pour s’isoler véritablement dans l’intimité de l’auteur mais également pour garantir la meilleure distanciation entre visiteurs par ces temps de pandémie. À titre personnel, et j’imagine pour tout amateur de l’œuvre de Proust, cette exposition ne peut que vous donner envie de relire cette grande œuvre qu’est A La Recherche du temps perdu, depuis Du Côté de chez Swann jusqu’au Temps Retrouvé en flânant naturellement A l’Ombre des Jeunes filles en fleurs et en redécouvrant Albertine disparue ! 

Découvrez ici une vidéo de l’exposition réalisée par l’auteur (1’28”).

Vincent Leglaive

Master 1 EAD Histoire des Sociétés Modernes et Contemporaines dans la Mondialisation

Mémoire d’histoire contemporaine sous la direction de Xavier Vigna

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