En octobre 1870, G. Garibaldi offre son épée à la République française qui naît dans de dramatiques circonstances. Son engagement dure 5 mois, jusqu’en mars 1871. Il commande un regroupement d’unités disparates : l’Armée des Vosges. Son action a été longuement critiquée dans les années qui suivirent la guerre. Cet article a pour objectif de donner à l’aune de l’historiographie actuelle une vision de son bilan à la fois historique mais aussi politique.

Quel est le bilan militaire et politique de son intervention à la tête de l’armée des Vosges ?

Photo de Giuseppe Garibaldi, 1870, prise par Felix Nadar

Le 3 septembre 1870 à Sedan, le Second Empire, déjà fragilisé, s’effondre. Le 4 septembre, la République est proclamée à Paris dans l’enthousiasme général. Partout dans le monde le possible réveil révolutionnaire de la grande nation inquiète. Léon Gambetta, à la recherche de soutien, parcourt les cours d’Europe. Mais la République effraie. Le souvenir de 1793 reste vivace. La République naissante ne trouve aucun soutien extérieur si ce n’est quelques républicains encore animés de l’esprit de 1848, comme l’italien Giuseppe Garibaldi.

Garibaldi propose immédiatement son épée à la République. Débarquant à Marseille en octobre 1870, il proclame : « Je viens donner à la France ce qui reste de moi. La France est une patrie que j’aime », « J’étais trop malheureux quand je pensais que les républicains luttaient sans moi ».  Que va faire le gouvernement de Tours de ce volontaire, certes prestigieux, mais encombrant ? N’a-t-il pas déjà par deux fois porté les armes contre la France ? Beaucoup se souviennent de son engagement contre les troupes françaises à Mentana et de son anticléricalisme. G. Garibaldi, le libre-penseur, est un rouge. Cela inquiète la majorité des Républicains du gouvernement de défense nationale qui ne le sont pas. En effet, ces derniers sont des libéraux et des modérés, comme J. Favre, J. H. Magnin, E.Picard etc…

Mais, les républicains plus radicaux sont influents à Tours. Le nom de G. Garibaldi peut galvaniser les volontaires. Pourtant, les militaires connaissent sa véritable valeur… Alors que faire du héros des deux Mondes ? Il se trouve qu’un regroupement de troupes hétéroclites n’a plus de chef, c’est l’armée des Vosges. Le général H. A. Cambriels, blessé, renonce à son commandement. En outre, des volontaires venus de toutes parts, des provinces, des colonies, de l’étranger, affluent sans que l’on sache exactement quoi faire de ces va-t’en guerre peu formés et peu disciplinés. L. Gambetta va trancher. Il confie le commandement de toutes les compagnies de francs-tireurs de l’Est de la France à G. Garibaldi. Un regroupement hétéroclite voit le jour, l’armée des Vosges. Cette dernière combattra sur un axe Bourgogne-Franche Comté.  L. Gambetta proclame alors : « Garibaldi que nous avons nommé général en chef va se jeter dans les Vosges ». [1]

La confirmation de son commandement est donnée à Lyon par le comité central d’une ville très républicaine : « Citoyens ! Le héros populaire des guerres d’Italie et d’Amérique, celui dont l’épée est acquise à la défense de toutes les nobles causes, Garibaldi, apporte à la République Française le concours d’une longue expérience et le prestige d’un nom glorieux ». [2]

GARIBALDI A LA TETE DE L’ARMEE DES VOSGES 

G. Garibaldi rejoint son armée à Dôle le 14 octobre 1870. Il y fait une proclamation enthousiaste :
« Mais la nation est là, levée comme un seul homme ; elle fera repentir bientôt le vieil autocrate d’avoir voulu continuer sa boucherie d’hommes. Quelle noble mission est donc la nôtre ! Fils de la liberté ! Elite de tous les peuples ! Oh, certes, je ne changerais point mon titre de milicien de la République pour une Couronne ». [3]   

C’est le début des grands discours enflammés souvent peu en lien avec une réalité du terrain dramatique et la motivation des gardes mobiles et des francs-tireurs français qui veulent surtout chasser le prussien de France. 

Le mythe du héros révolutionnaire romantique [4] va se confronter à l’efficacité prussienne.  

L’armée allemande que va affronter G. Garibaldi dans l’Est de la France est redoutable. Elle est commandée par le général badois Von Werder, le brûleur de Strasbourg.  Certes, G. Garibaldi jouit d’un grand prestige du fait de l’expédition des Mille. Il est aussi un remarquable entraineur d’hommes, mais il est peu habitué à affronter efficacement une armée européenne moderne. En 1870, il est âgé, fatigué et perclus de rhumatismes, il ne monte presque plus à cheval. 

LES FORCES GARIBALDIENNES  

L’armée de H. A. Cambriels est en partie démantelée. G. Garibaldi hérite de 15 000 hommes dont une brigade de gardes mobiles qui doit constituer le noyau dur de l’armée, le reste, ce sont des francs-tireurs de tous horizons. 

Une loi impériale de 1868 a donné un statut légal à ces corps de volontaires, équipés et habillés à leurs frais. A partir de septembre 1870, ils se multiplient partout dans le pays. Leur valeur militaire est souvent faible et très inégale.  

La plupart de ces compagnies de volontaires sont dirigées vers l’armée des Vosges. Elles ont des effectifs modestes, 50 à 100 hommes. Pour L. Gambetta, ce sont « des poignées de braves qui se sont levés pour défendre la patrie ».  La réalité est moins glorieuse. Ces troupes sont souvent indisciplinées, peu entrainées voir inutiles.  La République ne sait parfois que faire de ces volontaires. Finalement, G. Garibaldi peut avoir une utilité pour le gouvernement de Tours en commandant ces troupes. On y trouve pêle-mêle les volontaires venus d’Algérie, de l’étranger, de toutes les provinces de France : les francs-tireurs de la mort d’Alger, les francs-tireurs de Constantine, les enfants perdus du Beaujolais, la guérilla marseillaise, les ours nantais, en tout une soixantaine de troupes aux tenues bigarrées  et quelques centaines d’étrangers, principalement des Italiens et des Espagnols, mais aussi des Américains, “les francs-tireurs venus de Montevideo, de Buenos-Aires, du Brésil portent le poncho américain, le chapeau de feutre à plume d’or et le revolver à la ceinture”. D’autres ont des guêtres jaunes, des capes grises ou rouges et des chapeaux pointus à rubans ou à plumes d’aigle qui leur donnent “l’apparence de bandits calabrais”. D’autres encore, en dépit de leurs épaisses fourrures, ne sont pas “des trappeurs de l’Ouest du grand désert américain” mais… des partisans nantais » [5]. 

Selon De Coynard « seuls 8 000 francs-tireurs sont en état de tenir campagne, le reste de mobilisés mal armés, mal vêtus, sachant à peine tenir un fusil ne peuvent être efficace » [6]. 

Le commandement a cependant des qualités. G. Garibaldi peut s’appuyer sur ses fils Ricciotti et Menotti et sur l’excellent officier polonais Bossak-Hauké ainsi que sur le colonel Delpech pour commander les quatre brigades de son armée. Son état-major est en revanche plus discutable avec son gendre Stefano Canzio et surtout le sulfureux Bordone qui est son chef d’état-major. 

La mission que L. Gambetta confie à G. Garibaldi est difficile. Ce dernier est chargé de défendre la route de Lyon, et avec les francs-tireurs, d’entretenir l’insécurité, de couper les communications et les approvisionnements des Prussiens, en somme faire de la guérilla. Ces derniers objectifs, bien réalisés, auraient pu avoir une efficacité certaine pour l’effort de guerre républicain. Mais comment G. Garibaldi peut-il contenir une armée prussienne aguerrie, nombreuse avec sa troupe de volontaires ? 

LES OPERATIONS MILITAIRES 

Le 12 novembre 1870, G. Garibaldi se rend à Autun où il a la mission de protéger les établissements sidérurgiques du Creusot et la route de Nevers tout en tenant en respect les Badois qui cantonnent à Dijon. Les grands combats vont se livrer sur la Loire. Le 19 novembre 1870, Ricciotti Garibaldi qui commande la meilleure brigade de l’armée composée essentiellement d’Italiens lance un coup de main victorieux à Chatillon. Il surprend les Allemands et il capture cent soixante-cinq Bavarois.  Puis l’armée se dirige sur Dijon occupée par les troupes de Von Werder depuis le 31 octobre 1870. Le 26 novembre 1870, l’armée des Vosges attaque une force prussienne au village de Pâques qui se replie, et dans la nuit, elle tente de s’emparer de Dijon sans succès. L’artillerie badoise et une contre-attaque surclassent rapidement les Garibaldiens. 

Mais Dijon est jugée par l’état-major prussien comme étant une position trop avancée et périlleuse. Les Badois et les Prussiens évacuent la ville le 27 décembre 1870. Les troupes de l’armée des Vosges invertissent alors Dijon. G. Garibaldi fait fortifier Dijon. Près de vingt-quatre milles hommes stationnent dans la ville en permanence, ce qui pose d’énormes problèmes à la municipalité. Des unités de l’armée de l’Est passent par Dijon car le général Bourbaki se met en route pour délivrer Belfort. Sa grande offensive débute début janvier 1871. Elle peut être déterminante pour la guerre. Or, entre Bourbaki et G. Garibaldi, il y a peu de contact.  

Riciotti Garibali reçoit le drapeau du 61ème régiment d’infanterie prussienne de la part du franc-tireur Victor Curtat, le 23 janvier 1871. Imagerie d’Epinal N °147

« Bourbaki n’avait peut-être pas plus envie de commander à Garibaldi que Garibaldi ne se souciait d’être commandé par Bourbaki. Il n’y avait même aucun rapport régulier et suivi entre les deux camps » [7]. G. Garibaldi ne se porte pas en direction de l’armée de l’Est. Malade, il reste inactif, c’est surtout Bordone qui dirige. Le général Von Werder en fin stratège laisse une brigade, environ 4 000 hommes, autour de Dijon pour « amuser » G. Garibaldi selon ses propres mots. Cette dernière attaque Dijon les 21, 22 et 23 janvier 1871. Les troupes allemandes sont repoussées et un drapeau est même pris à l’ennemi par la brigade Ricciotti, le 61e régiment allemand de Poméranie [8]. Le soir du 23 janvier, comme à son habitude G. Garibaldi s’enflamme dans une grandiloquente déclaration de victoire alors que la guerre vient de se perdre dans l’Est. « Au fond, c’était à coup sûr le plus médiocre triomphe, et il n’y avait pas de quoi dire à ces jeunes soldats des Vosges qu’ils avaient « reçu les talons des terribles soldats de Guillaume, » que tous les « opprimés de la famille humaine » saluaient en eux leurs champions ». [9] L’armée de Bourbaki à qui il n’a apporté aucun soutien vient d’être vaincue, mise en déroute et finalement internée en Suisse…Les Allemands ont les mains libres et ils redescendent sur Dijon. 

Finalement, Paris capitule le 28 janvier 1871 et l’armistice est signé. G. Garibaldi évacue Dijon avec le gros de ses troupes devant l’avance allemande. Mais le 31 janvier 1871, une nouvelle ahurissante tombe, la Côte-d’Or, le Jura, le Doubs et Belfort ne sont pas compris dans l’armistice !  Bordone que G. Garibaldi avait laissé à Dijon avec une faible garnison doit quitter la ville. Les Allemands reviennent pour une seconde occupation.  Le 17 février 1871, l’armistice est signé pour l’ensemble du pays.

Le 26 février 1871, les préliminaires de paix sont signés. La République n’a plus besoin du général italien. 

Alors quel bilan faut-il tirer de l’intervention de G. Garibaldi ?   

 

LES GARIBALDIENS : DES TROUPES A LA REPUTATION CONTROVERSEE    

L’intervention des Garibaldiens a entrainé de nombreuses critiques. Le comportement des troupes de l’armée des Vosges a fait scandale. A Autun par exemple les habitants sont scandalisés. Cantonnés dans la cathédrale, les Garibaldiens brûlent les meubles pour se chauffer.  

Les troupes sont peu disciplinées, elles comprennent dans leur rang des déserteurs d’autres armées, notamment des Espagnols. Elles vont se rendre coupables souvent de larcins, de vols. Un dénommé Piccoty des « enfants perdus de Paris » est condamné pour avoir voulu assassiner une Dijonnaise le 25 janvier 1871 [9]. D’autres sont condamnés pour désertions.  En comparaison de ces cohues, de ces hordes habillées de rouge comme celles de G. Garibaldi, on étale la bonne tenue, la discipline, l’efficacité des troupes allemandes dans les « moniteurs », journaux officiels allemands des gouvernements généraux de Lorraine et de Champagne. Ces derniers sont peu lus mais ils reflètent néanmoins ce que pensent majoritairement la bourgeoisie provinciale. Pour couronner le tout, Bordone, le chef d’état-major de G. Garibaldi, jouit d’une réputation déplorable. C’est un aventurier, un ancien chirurgien de marine, un ami de longue date du chef italien. Il a eu plusieurs condamnations pour actes de violence et escroquerie avant la guerre. Une affaire l’oppose également à un officier français, le lieutenant-colonel Chenet qui l’accuse de se servir d’une compagnie de francs-tireurs, la guérilla d’Orient, comme d’un groupe mafieux à sa solde ! [10] 

Mais les troupes de G. Garibaldi ont-elles causées plus de dommages que les autres ? Ce n’est pas certain, des considérations politiques ont certainement contribué à mettre en avant ces critiques. 

Il est difficile de toute façon de contester le courage et l’engagement de ses troupes, comme celui du général Bossak-Hauké qui trouve la mort le 22 janvier 1871 en défendant Dijon ainsi que ceux des 676 volontaires garibaldiens soldats et officiers qui tombent dans les journées du 21-22-23 janvier 1871.  

GARIBALDI, A-T-IL UNE RESPONSABILITE DANS L’ECHEC DE L’ARMEE DE L’EST DE BOURBAKI ?

Les accusateurs de G. Garibaldi lui reprochent de ne pas avoir soutenu Bourbaki. Il aurait pu avec ses francs-tireurs harceler et désorganiser les troupes allemandes, mais G. Garibaldi est resté à Dijon et s’est gargarisé de la défense, inutile, de la ville. Il aurait du soutenir l’armée de l’Est de Bourbaki, en difficulté. Le général Ducrot va accuser G. Garibaldi de cette erreur à l’assemblée de Bordeaux. Stratégiquement, c’est une erreur, cela ne fait aucun doute. G. Garibaldi n’a pas eu une vision stratégique du conflit. Mais peut-on le lui reprocher ? Les ordres n’ont jamais été clairs. Le gouvernement de Tours n’a jamais inclus la division Cremer et l’armée des Vosges dans le commandement de Bourbaki. C’est une erreur dont les conséquences ont été désastreuses mais la faute n’est pas uniquement imputable à G. Garibaldi. Comme “Bourbaki, le meilleur des soldats, le pire des généraux” disait Napoléon III, G. Garibaldi est un meneur d’hommes, pas un stratège. Les ordres de rejoindre Bourbaki ne lui ont jamais été clairement donnés. 

UNE TACTIQUE ENTRAINANT UNE VIOLENCE DE GUERRE ACCRUE 

Garibaldi et ses unités ont contribué à mettre en place une nouvelle façon de combattre, déjà connue en Espagne en 1808/1813, et qui se développe au XIXe siècle, notamment durant la guerre de Sécession : la guérilla. Une des grandes réussites tactiques de G. Garibaldi fut le coup de main à Chatillon-sur-Seine, nœud ferroviaire important où les hommes de Riciotti Garibaldi capturent 165 Bavarois. Mais par la suite la ville subit de lourdes représailles et elle est livrée au pillage. Des otages sont arrêtés et menacés d’être fusillés … L’emploi massif du franc-tireur, soldat semi-régulier, invisible, qui frappe et qui disparaît, permet finalement aux Allemands de justifier une répression de plus en plus dure, surtout avec les civils. Une violence de guerre s’installe. Il y a également l’affaire du soldat brûlé vif du combat de Pouilly le 23 janvier 1871. Les Allemands auraient brûlé vif un franc-tireur, soldat non régulier, pour l’exemple [11]. Cet acte permet aux Garibaldiens d’afficher la barbarie allemande et ainsi de construire l’ennemi. Il apparaitra plus tard que le soldat était déjà mort lors de l’incendie. Mais la guerre change de visage, elle engage la totalité de la nation avec des combattants improvisés qui ne respectent pas toujours les codes de la guerre et la violence s’accroît.

GARIBALDI, AVANT TOUT UN ENGAGEMENT POLITIQUE   

Le gouvernement de Tours comblait officiellement G. Garibaldi de flatteries. En réalité, il se serait bien passé d’un tel auxiliaire à qui il n’avait pas fait appel.  Donner un commandement à G. Garibaldi entraîne des conséquences politiques pour la République, car G. Garibaldi est un rouge : il a des idées radicales, anticléricales. Il était impossible de lui donner une armée française régulière, les officiers français de toute façon ne l’accepteraient pas. Alors on lui a confié une troupe bigarrée avec un noyau dur d’Italiens, puis des étrangers, des méridionaux aux noms évocateurs de leurs sentiments politiques  « francs-tireurs de l’égalité » ,  « égalité marseillaise ». Léon Gambetta, malgré son appel à la levée en masse se méfie de ces troupes. Dans le décret du 29 septembre 1870, il place ces troupes sous l’autorité du ministre de la Guerre [12]. Plus tard, il précise que les francs-tireurs se doivent d’obéir à un commandement militaire. Cependant, Lyon, ville républicaine qui a déjà proclamé une commune révolutionnaire en septembre, accueille G. Garibaldi à bras ouvert car les Garibaldiens sont une force à part, ils sont considérés comme des révolutionnaires, des combattants de la liberté. Ils constituent une troupe politisée, républicaine, anticléricale qui lutte contre l’oppression. Les officiers sont élus selon leur mérite. Pour un grand nombre de dirigeants français, les garibaldiens peuvent se montrer dangereux. En outre, ils ne sont pas toujours bien acceptés par la population, voilà ce qu’écrit une Dijonnaise : « La ville est remplie de Garibaldiens, francs-tireurs, troupes de la Loire, volontaires, mobiles. Ce qu’il faut craindre c’est à l’avenir la guerre civile qui certainement sera la conclusion de la guerre. Les esprits fermentent, ils sont en général fort mauvais. Les rouges veulent dominer » [13].

Ces hommes en armes, souvent étrangers, qui défendent la république universelle et les droits de l’homme, inquiètent la bourgeoisie provinciale. La nouvelle république partage-t-elle véritablement leurs idées ? Nous pouvons en douter. Finalement, G. Garibaldi n’a jamais eu la pleine confiance du gouvernement de Tours, ce qui explique peut-être son manque d’initiative et son inaction pour aider Bourbaki. Les relations se dégradent très vite avec Adolphe Thiers : hostile à G. Garibaldi, il veut le chasser de France. 

Aux élections du 8 février 1870, G. Garibaldi est élu député de Paris, dans le Bas-Rhin, en Savoie et à Dijon, mais il refuse ces mandats car il sait que la nouvelle assemblée, majoritairement royaliste, lui est hostile. Il est encore élu à Alger mais l’assemblée l’invalide le 8 mars car il n’est pas Français. Victor Hugo prend sa défense devant cette assemblée monarchiste déclamant qu’il est le seul général à ne pas avoir été vaincu durant la guerre : « Garibaldi est le seul des généraux qui ont lutté pour la France, le seul qui n’ait pas été vaincu. Il y a trois semaines, vous avez refusé de l’entendre. Aujourd’hui vous refusez de m’entendre. Cela me suffit. Je donne ma démission  ». Mais écœuré par les députés qui l’insultent, il démissionne [14]. L’assemblée s’acharne contre les républicains radicaux. La France est divisée, un fossé infranchissable se met en place entre l’idéologie de droite et celle de gauche.  Mais le danger ne viendra pas des chemises rouges et des groupes armés de francs-tireurs républicains. C’est la commune de Paris qui va matérialiser dans le sang cette division. 

La commune de Paris veut lui confier le commandement militaire mais G. Garibaldi refuse prétextant que c’est une affaire uniquement française. Son fils Menotti sera néanmoins membre de la commune pendant un certain temps [15]. Il y retrouvera des anciens garibaldistes comme Assi, Cipriani ou Cécilia. La nouvelle historiographie qui s’attache désormais à étudier de concert la guerre de 1870 et la commune a bien compris les liens politiques qui unissent ces deux crises.  

LES DEBUTS D’UN VOLONTARIAT INTERNATIONAL  

L’engagement de G. Garibaldi est aussi le symbole d’un premier volontariat international armé républicain porté par un idéal de fraternité universelle. Des Irlandais, des Italiens, des Espagnols, des Américains s’engagent non pas pour la France mais pour la République, pour un idéal politique, pour la liberté. Finalement, le combat nationaliste du XIXe siècle commence à se transformer en combat politique, idéologique qui n’a plus de frontière. Mais cette première tentative se termine par un échec. Les monarchistes victorieux vont s’en prendre à G. Garibaldi, symbole des républicains étrangers venus au secours du pays. G. Garibaldi est accusé d’incompétences. Voici la description que fait de lui l’écrivain royaliste Charles de Mazade : « C’était un personnage et un personnage embarrassant par son âge et ses infirmités, par les passions et les fantaisies de radicalisme cosmopolite dont son nom était le symbole, par les prétentions et les fanatismes qui s’agitaient autour de lui, par l’originalité même de sa situation…. Dans sa chemise rouge et dans son manteau gris, il ressemblait à une apparition plus qu’à un général » [16]. Son image est aussi ternie dans le monde anglo-saxon avec le pamphlet du journaliste anglais Robert Middleton  «  Garibaldi et ses opérations à l’armée des Vosges » de 1872 qui écrit dans sa préface  «  nous prenons Garibaldi à Caprera et nous le remettons à Caprera , Dieu veuille qu’il n’en sorte plus jamais » [17]. Malgré tout la légende demeure car Il est à l’origine d’une grande idée, celle de la solidarité politique transnationale qui combat pour un idéal de justice, issue de l’époque du Printemps des Peuples, qui transgresse l’étroitesse des frontières et qui aura des répliques par la suite, et tout d’abord dans le mouvement communard.

Danaé Louvier
Master 1 Les sociétés modernes et contemporaines dans les mondialisations.
Mémoire d’histoire contemporaine sous la direction de Xavier Vigna.

[1] François Roth, La guerre de 70, edts Fayard, 1990, page 241
[2] Le petit journal 18 octobre 1870
[3] Extrait de la proclamation de Garibaldi, Archives Municipales de Dijon, cote 4H2
[4] Voir Hubert Heyriès, Garibaldi, le Mythe de la révolution romantique, Toulouse, edts Privat 2002
[5] Auguste Foubert, Vandales et vautours ou l’invasion, par un Franc-tireur du Corps Lipowski, Rennes, Leroy et fils, 1871, p. 104
[6] Selon De Coynard p 77 Raymond de Coynart, La Guerre à Dijon, 1870-1871 : relation militaire, Paris, J. Dumaine, 1873
[7] Charles de Mazade, La guerre de 1870/1871, Revue des Deux Mondes, 2e période, tome 102, 1872, p775
[8] Seul drapeau prussien pris par le Franc-tireur Victor Curtat de la compagnie des chasseurs du Mont blanc
[9] Charles de Mazade, La guerre de 1870/1871, Revue des Deux Mondes, 2e période, tome 102, 1872 , p789
[10] Affiche dijonnaise pendant la guerre de 1870/1871 134 PIÈCES
[11] Gaudelette, Histoire de la guerre de 1870/71 dans la Côte d’Or, page 169
[12] Armel Dirou, La guérilla en 1870, résistance et terreur, bgedition, Saint-Denis, 2014, P51
[13] Journal anonyme d’une Habitant de 1866 à 1871. Bibliothèque municipale de Dijon, le 27/12/1870
[14] L’invalidation de Garibaldi par l’Assemblée nationale , Jérôme Grévy Dans « Parlement[s], Revue d’histoire politique » 2011/2 (n° 16), pages 44
[15] René Le Moal « Garibaldi (1807-1882) et ses trois vies enchevêtrées », Dans La chaîne d’union 2008/2 (N° 44), pages 75
[16] Charles de Mazade , La guerre de 1870/1871 , Revue des Deux Mondes, 2e période, tome 102, 1872 , p765
[17] Robert Middleton « Garibaldi et ses opérations à l’armée des Vosges » , edts Garnier , Paris 1872 , page 4

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