Compte-rendu de l’article : “De la Grande Alliance à l’affrontement armé Est-Ouest (1944-1950) : origines de la Guerre froide et débats historiographiques” de Justine Faure ; sortie de guerre au XXe siècle, Histoire@Politique, revue électronique du Centre d’histoire de Science Po, page 16, novembre-décembre 2007

Résumé :

Cet article nous présente les points de vue et recherches historiographiques sur les causes profondes de la guerre froide. Les aspects militaire, économique, politique et idéologique sont abordés par l’auteure afin de mieux éclairer les facteurs de l’établissement de ce conflit entre les deux superpuissances antagonistes que sont les Etats-Unis et l’URSS. Une partie des archives de l’histoire soviétique a été rendue accessible et consultée par des historiens. On y voit une division assez claire des historiens sur l’attribution des responsabilités du déclenchement de la guerre froide. Et, surtout, l’auteure propose également une réflexion sur la fin de la formation des alliés qui ont vaincu les forces de l’Axe pendant la Seconde Guerre mondiale.

 

L’article qui nous intéresse s’intitule : De la Grande Alliance à l’affrontement armé Est-Ouest (1944-1950) : origines de la Guerre froide et débats historiographiques, rédigé par Justine Faure. Cette dernière est professeure des universités en Histoire contemporaine. Ses axes de recherche et ses travaux scientifiques portent sur des thèmes dans lequel s’inscrit cet article : les relations internationales, la Guerre froide, les États-Unis et l’Europe de l’Est. L’auteure propose une étude et une réflexion sur la fin de l’état de l’alliance formée par les alliés et les débuts de l’affrontement armé entre les deux blocs, qui prend une dimension culturelle et économique, en plus de l’aspect militaire.

Cet article peut faire écho à l’actualité géopolitique brulante (la guerre entre la Russie et l’Ukraine débutée le 24 février 2022). La complexité de cette guerre nous renvoie à celle des héritages territoriaux en Europe de l’Est, hérités de la guerre froide et de la fin de celle-ci. Les Occidentaux et les Américains semblent faire bloc pour soutenir l’Ukraine face à la Russie. Bien sûr, ce bloc qui se forme ou se reforme, n’est pas le même que le bloc occidental de celui de la guerre froide. Mais les visions et allégations émises d’un camp envers l’autre, sont lancées, tout comme pendant la guerre froide.

En effet, Justine Faure mentionne « la volonté soviétique d’acquérir un rôle prééminent en Europe centrale et balkanique »[1]. On peut déjà y voir une position occidentale qui attribue à l’URSS une motivation territoriale. Il est certain que l’URSS souhaitait se protéger, renforcer et élargir sa sphère d’influence et de contrôle en Europe de l’Ouest et en Europe orientale, notamment avec la mise en place des pays satellites ou pays frères. De plus, on a vu que les tentatives de prise de force ont échouées, ne serait-ce que pour le blocus de Berlin. L’expression « glacis protecteur » [2], laisse entendre que l’URSS voulait se préserver, suite à la grande tragédie vécue qui est celle de l’invasion de l’armée allemande pendant la Seconde Guerre mondiale. Les alliés ont fait des concessions et ont voulu ménager l’URSS pour mieux se protéger également. Mais ils ont établi eux aussi, à travers leurs manœuvres militaires et politique, comme l’URSS, des buts économiques, militaires et territoriaux. En témoigne cette mention des «efforts américains pour préserver leurs intérêts économiques dans la région».[3] On comprend donc que les Américains n’ont sans doute pas aidé l’Europe de l’Ouest uniquement dans un but militaire et diplomatique. Et les soviétiques souhaitaient à tout prix empêcher une nouvelle attaque et invasion allemande sur leur territoire qu’est l’URSS. Cela a constitué un véritable traumatisme, mais soigné en partie avec la « Grande guerre patriotique » [4] menée par l’armée soviétique et le peuple russe.

Aussi, la chronologie de la guerre froide semble sujette à analyse et débat entre les dates de 1947 et 1948. Les signes de relations très tendues et l’aspect dangereux sont soulignés par l’auteure. Effectivement, Staline n’accepte pas la présence occidentale en Allemagne, lors du partage des zones de celle-ci, et il souhaite l’intégrer dans l’URSS. Aussi, la chronologie du début de la guerre froide pose question. Entre les événements de Prague, le blocus de Berlin et le Rideau de fer et les réactions et prises de position soviétique et occidentale, l’enchaînement des causes à effets dans les débuts de la guerre froide semble complexe. L’Europe est coupée en deux mais les deux camps communiquent malgré tout. L’auteure évoque une « dimension spécifiquement européenne des relations internationales ». [5]  Ces échanges sont de nature culturelle (« les centres culturels occidentaux continuaient de fonctionner en Europe centrale ») et économique (« en 1949, 25% du charbon consommé en Europe occidentale provenait de Pologne »). [6]  Et les alliés occidentaux et soviétiques avec leurs actions et leurs idéologies respectives contribuèrent à former ce monde bipolaire de la guerre froide. Enfin, cet article incite le lecteur à prendre du recul et à faire preuve de nuance sur sa propre vision des causes de ce conflit entre les deux Grands.

Arnaud Brisset
Master 1 EAD Les sociétés modernes et contemporaines dans la mondialisation.
Mémoire d’histoire moderne sous la direction de Laurence Croq.

 

Source du dessin de couverture : Illingworth, Leslie Gilbert, publié le 29 octobre 1962 dans le Daily Mail.

[1] “De la Grande Alliance à l’affrontement armé Est-Ouest (1944-1950) : origines de la Guerre froide et débats historiographiques” de Justine Faure ; sortie de guerre au XXe siècle, Histoire@Politique, revue électronique du Centre d’histoire de Science Po, novembre-décembre 2007, page 6

[2] “De la Grande Alliance à l’affrontement armé Est-Ouest (1944-1950) : origines de la Guerre froide et débats historiographiques” de Justine Faure ; sortie de guerre au XXe siècle, Histoire@Politique, revue électronique du Centre d’histoire de Science Po, novembre-décembre 2007, page 6

[3] “De la Grande Alliance à l’affrontement armé Est-Ouest (1944-1950) : origines de la Guerre froide et débats historiographiques” de Justine Faure ; sortie de guerre au XXe siècle, Histoire@Politique, revue électronique du Centre d’histoire de Science Po, novembre-décembre 2007, pages 5-6

[4] L’Armée rouge (1/2) La grande guerre patriotique, documentaire de Michaël Prazan, 2021

[5] “De la Grande Alliance à l’affrontement armé Est-Ouest (1944-1950) : origines de la Guerre froide et débats historiographiques” de Justine Faure ; sortie de guerre au XXe siècle, Histoire@Politique, revue électronique du Centre d’histoire de Science Po, novembre-décembre 2007, page 14

[6] “De la Grande Alliance à l’affrontement armé Est-Ouest (1944-1950) : origines de la Guerre froide et débats historiographiques” de Justine Faure ; sortie de guerre au XXe siècle, Histoire@Politique, revue électronique du Centre d’histoire de Science Po, novembre-décembre 2007, page 14

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